Compte-Rendu des évènements du week-end du 21 Juin

Comptes rendus des évènements du week-end du 21 juin


Médecins du monde : « Des records de violence policière »

 

Par Chloé Leprince | Rue89 | 07/07/2009 | 13H46

« Fracture de la base du nez liée à un tir de flashball en plein visage sur un jeune homme âgé d'environ 25 ans », « plaies cutanées du cuir chevelus et du front avec saignement important lies à un matraquage prononcé d'un jeune homme âgé d'une vingtaine d'année », « matraquage d'un bénévole de 27 ans en fauteuil roulant », « traumatisme du coude et de la hanche chez une jeune femme de plus de 20 ans qui prenait des images avec sa caméra, laquelle fut détruite par les policiers »…

Ces extraits éloquents sont issus du rapport de soins de Médecin du Monde après les affrontements entre les forces de l'ordre et les teuffeurs, qui avaient organisé pour la Fête de la musique (et après la Free parade qui défilait à Paris dans l'après-midi du 20 juin), une rave dans la nuit de samedi à dimanche 21 juin à partir de minuit dans le Bois de Boulogne, à la lisière de Paris.

C'est Roberto Bianco-Levrin, chef de la mission « Rave et squats » chez MDM, qui a rédigé ce rapport de soins, que Rue89 s'est procuré. Lui aussi qui a entrepris « avec difficulté » de réunir des témoignages de cette journée au lendemain de laquelle l'alors ministre de l'Intérieur annonçait déjà 223 interpellations dont 196 gardes à vue, dont une petite moitié à Paris, où plusieurs témoignages sont arrivés à la rédaction pour raconter « des tirs de flashball à bout portant ».

Ce 22 juin, Michèle Alliot-Marie précisait que ces statistiques trahissaient « essentiellement des atteintes aux forces de l'ordre ou des violences ». Or, ce que Roberto Bianco-Levrin soutient, c'est qu'il n'a « jamais vu une telle violence » envers des teuffeurs, qu'il estime à « environ 600 dans un espace de 500 mètres par 30, au milieu du bois ». Le coordonateur de la mission raves est pourtant permanent de Médecins du Monde depuis 2001.

Sur place, il raconte avoir observé « une grande agressivité » de la part des forces de l'ordre avec qui il assure que « un dialogue plutôt paisible » s'était pourtant engagé avant minuit :

« Vers une heure du matin, une première charge policière très violente a eu lieu, massacrant les sound systems avec des coups de matraque sur les consoles, les enceintes. C'était la BAC75 [Brigade anticriminalité de Paris, ndlr] et des policiers anti-émeutes. Puis ils ont balancé des gaz lacrymoègnes, qui ont conduit un certain nombre de teufeurs à s'éparpiller dans les bois, où de petits groupes de policiers isolés les interceptaient.

La réplique était très violente, avec usage de grenades, matraquage au sol et tirs de flashball tendus. J'ai vu une fille avec des brûlures liés au gaz, un autre avec des éclats de verre incrustés sous les paupières parce que la police roulait en trombe sur des bouteilles de verre. »

Côté préfecture de police, on affirme n'avoir reçu aucune plainte et donc pas fait d'enquête. Seul retour des équipes du terrain :

« Un climat très tendu et des tirs de projectiles contre les véhicules de la police. »

Chez MDM, on confirme que les langues ont été difficiles à délier et que l'on en est pas au stade de la plainte. C'est le cas pour Teddy, le bénévole de 27 ans amputé des jambes, qui a été matraqué au niveau du haut du corps. Il n'a pas porté plainte mais son témoignage, conforté par plusieurs membres de l'équipe de l'ONG et adressé par écrit à Rue89, est édifiant :

« Une de mes activités avec l'équipe est le soutien psychologique. Vers 03h20, alors que je me trouvais avec un autre membre de la mission, sur le trottoir de l'avenue Gandhi, protégé derrière un véhicule, auprès d'une jeune femme qui était en état de choc, j'ai reçu un coup violent de matraque sur le bras droit.

Je n'ai pas vu mon agresseur, car je tournais le dos à la charge policière et que cette charge se déroulait principalement sur la chaussée, alors que je me trouvais en marge des affrontements.

Je me suis retourné et j'ai vu un policier en tenue anti-émeute, la matraque à la main, qui après une brève hésitation, a saisi mon fauteuil roulant et m'a très violemment poussé en criant, entre autres : « Toi tu dégage de là… Je vais te défoncer ! »

Déstabilisé, j'ai perdu l'équilibre et j'ai été aidé par les teuffers qui se trouvaient sur place à me remettre sur le trottoir et à me protéger d'une autre agression.

J'ai eu très peur, la personne que je tentais de rassurer est partie en courant. Les teuffers sont également partis en courant, car la charge de police était violente et continue : j'ai vu un policier en tenue pointer son Flash Ball, en direction du visage d'une jeune femme et la menacer en criant. »

Si Roberto Bianco-Levrin maintient que « c'est la première fois que la violence atteint de tels sommets en huit ans de présence sur le terrain », il note toutefois que de plus en plus de missions font remonter un regain de tension, localement, « y compris des exactions vis-à-vis des associatifs ».

Il rapporte ainsi avoir entendu plusieurs de ses bénévoles « se faire traiter de fils de pute alors qu'ils étaient bien estampillés MDM, avec des chasubles, des brassards et des autocollants un peu partout. »


22/07/2009
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